
21 février, la journée internationale de la langue maternelle souffle sur sa 25e bougie. Pour prendre le pouls de l’événement, nous prenons le risque de choisir la destination de Bamenyam, ce village des Bamboutos, situe aux extrémités de Galim, à proximité du Nord Ouest dont on sait la situation délétère depuis près d’une décennie aujourd’hui. Arriver sur le théâtre de l’événement, aucun autre moyen de transport que le benskin , la moto taxi. Sur les routes tortueuses de Bamenyam, l’aventure commence sur une motocyclette, où le conducteur semble avoir une audace qui défie notre propre appréhension de la mort. La poussière se lève en nuages à chaque passage d’un véhicule, enveloppant notre groupe d’une teinte de terre et de mystère. Malgré les intempéries, nous atteignons le village, où quelques enfants sont déjà rassemblés pour célébrer la Journée internationale de la langue maternelle.
Détour au Mont Basset
Avant de nous diriger vers la cérémonie, nous faisons un détour par le Mont Basset, un lieu chargé de sens et de beauté naturelle. Plus tard, notre chemin nous conduit à Neleup, un cours d’eau vital pour la région. À notre arrivée, des enfants jouent sur les rives tandis que d’autres se baignent joyeusement dans le courant. Un sableur, quant à lui, travaille en aval, ajoutant une touche de vie à ce tableau.
Le Marché Bamenyam : Un Souvenir Éprouvant
Bien que notre escale soit brève, elle est ponctuée par un appel urgent en provenance du site de la cérémonie. En nous dirigeant vers ce lieu, nous traversons la place du marché, un endroit qui réveille en moi des souvenirs douloureux. Il y a presque un an, des combattants séparatistes y avaient semé le chaos, causant des destructions, des kidnappings et, tragiquement, des pertes en vies humaines. Ce souvenir nous pousse à quitter rapidement cet endroit chargé d’émotions.
La Cérémonie : Un Moment de Rassemblement
À l’esplanade de la chefferie, une foule d’élèves, de femmes et d’hommes s’est rassemblée sous les arbres, prêts à célébrer. La cérémonie se distingue par son approche pragmatique : ni discours ni cérémonial formel, mais des ateliers qui commencent immédiatement. Ces ateliers incluent l’initiation aux chants et danses patrimoniales, la cuisine traditionnelle, ainsi que la lecture et l’écriture en langue Mengabo.
L’Engagement des Anciens
Les anciens du village, véritables gardiens de la culture, s’activent avec passion, entourés d’enfants curieux. Bien que certains tentent sans succès d’exécuter les chants ou de préparer les plats, l’enthousiasme demeure palpable. Les rires résonnent lorsque les enfants réussissent à prononcer le bon mot, à jouer la bonne note sur le balafon, ou à reproduire une recette traditionnelle.
Un Héritage Culturel à Transmettre
Il est important de noter que ces échanges ne sont pas seulement ludiques ; ils renforcent le lien entre les générations. Les jeunes apprennent que, bien avant les danses modernes, des rencontres festives étaient organisées, où les talents locaux se produisaient. Ces moments étaient des occasions privilégiées pour les jeunes de se rencontrer et de tisser des liens, avant que les parents ne prennent le relais lors des discussions finales.
Réflexions et Perspectives
La satisfaction exprimée par les jeunes concernant ces ateliers pratiques est un signe positif. Le président du département des langues du comité de développement de Bamenyam, tout sourire, souligne l’importance de l’implication des élites dans cette initiative. Son souhait est clair : réconcilier les jeunes avec leur culture à travers des approches ludiques et engageantes.
Le soleil décline déjà quand les dernières activités s’achèvent. Les sourires sur les villages des plus jeunes montrent bien que cette journée à Bamenyam aura été un témoignage vibrant de la vitalité culturelle de la région. La tenue de la cérémonie l »a suffisamment souligné, préserver les traditions et l’engager les nouvelles générations dans la continuité de cet héritage est un défi noble. En un mot, cette cérémonie est à mettre au rang de bel exemple de la manière dont la culture peut servir de pont entre le passé et l’avenir.
Preston Kambou