La commémoration, ce mercredi 18 juin, de la Journée internationale de la lutte contre les discours de haine, invite à s’interroger sur l’ampleur de ce phénomène au pays de Paul Biya.

La perspective de l’élection présidentielle prévue en octobre 2025 apparaît comme un catalyseur des discours de haine au Cameroun. La diffusion de messages de stigmatisation, de dénigrement et d’intimidation, sur fond de clivages politiques et ethniques, à travers les médias traditionnels et les réseaux sociaux, prend une proportion inquiétante à mesure que se rapprochent les échéances électorales.
Vingt-quatre heures avant la célébration de cette journée, Paul Biya invitait déjà les Camerounais à une expression libre mais encadrée par la loi : « Observez…, jugez…, dites ce que vous pensez…, agissez… », a-t-il déclaré, avant d’ajouter une condition essentielle : « Mais faites tout cela dans les limites qu’impose la loi, dans un esprit constructif, dans l’éthique démocratique, qui suppose dialogue, compromis, quête de l’objectivité. »
Le fait est que le seuil d’alerte semble avoir été franchi. Des messages sont diffusés, et des propos sont tenus lors de débats télévisés, où se mêlent outrances verbales, injures et critiques acerbes selon les appartenances politiques, et souvent, les origines ethniques.
Célébrée en 2025 sous le thème « Les discours de haine et l’intelligence artificielle », cette journée donne l’occasion aux Nations Unies de souligner que si la haine n’est pas nouvelle, son ampleur et son impact se sont accrus avec les nouvelles technologies de communication. Ces discours deviennent des outils courants de diffusion d’idéologies de division à l’échelle mondiale. S’ils ne sont pas contrés, les discours de haine compromettent la paix et le développement en alimentant les conflits et en entraînant de graves violations des droits humains.
Dans son message à l’occasion de cette journée, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, avertit : « Aujourd’hui, comme nous le rappelle le thème de cette année, les discours de haine se propagent plus vite et plus loin que jamais, amplifiés par l’intelligence artificielle. Des algorithmes et des plateformes numériques intégrant et reproduisant les préjugés diffusent des contenus toxiques et créent de nouveaux espaces de harcèlement et de violence. »
Terre d’accueil et d’hospitalité légendaire, le Cameroun gagnerait à mettre en œuvre le Plan d’action de l’ONU, qui souligne le rôle essentiel des partenariats impliquant les entreprises technologiques et les réseaux sociaux, en particulier dans l’utilisation de l’IA pour lutter contre les discours de haine. Si cette technologie offre des outils précieux pour l’alerte précoce et la prévention des conflits, elle comporte aussi des risques si elle n’est pas encadrée par des garanties solides en matière de droits fondamentaux.
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