
Dans une démarche audacieuse mêlant recherche académique et expression artistique, la chercheuse camerounaise Brigitte NGA ONDIGUI, actuellement en phase de finalisation de sa thèse doctorale en histoire de l’art à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), a organisé un événement inédit à l’Université de Yaoundé I, plus précisément à l’École Supérieure Polytechnique de Yaoundé. Composé d’une journée d’étude suivie d’un défilé de mode, l’événement était entièrement consacré au m’mouat, costume traditionnel du peuple Ekang.

Cette initiative, inscrite dans le cadre de sa recherche doctorale, constitue une première dans le programme interuniversitaire en histoire de l’art à l’UQAM. Elle incarne une approche novatrice de la Recherche-Intervention, où la théorie dialogue avec l’action.
Réflexion académique autour du costume traditionnel
La journée d’étude, intitulée Le m’mouat au Cameroun : bilan critique, enjeux culturels et perspectives de recherche, a réuni sept spécialistes issus de disciplines variées — histoire, sociologie, cinéma, art et stylisme. Pendant quatre heures, les intervenants ont exploré les dimensions culturelles, historiques et matérielles du m’mouat, mettant en lumière sa réappropriation contemporaine.
Porté comme symbole de statut social et de valeurs ancestrales, le costume a été analysé dans une perspective transdisciplinaire, intégrant vêtements, parures et ornements dans une lecture holistique.

Une parade comme acte de recherche
Le point culminant de l’événement fut la parade Nkil M’mouat, littéralement « la piste du m’mouat », en référence à la piste de l’éléphant (Nkilzok), symbole de puissance et de grandeur dans la culture Ekang.
Sept designers de mode ont présenté chacun entre cinq et dix tenues réalisées en obom, une matière végétale locale, réinterprétant le m’mouat dans un contexte postcolonial. Portée par les incantations d’un joueur de mvet, les tambours du rituel Esani et une scénographie enracinée dans les cultures du plateau Sud-Camerounais, la parade a transformé l’espace universitaire en un laboratoire vivant de création et de réflexion.

Entre science et engagement culturel
L’événement, orchestré par Brigitte NGA ONDIGUI, poursuivait deux objectifs majeurs :
- Scientifique : Documenter la résurgence du m’mouat, encore peu étudiée dans la littérature académique, et enrichir la compréhension de sa réappropriation dans les territoires Ekang.
- Militant : Valoriser le m’mouat au-delà des frontières camerounaises, mobiliser les communautés locales et renforcer la cohésion culturelle autour de cet héritage textile. Une ouverture vers l’international
À travers Nkil M’mouat, le costume traditionnel camerounais entre dans l’arène scientifique et créative mondiale. Comme le dit l’adage Ekang :
« Si tu n’as pas de problème avec la panthère, tu peux dormir sur sa piste. »
Réinvesti et réinventé, le m’mouat trace désormais sa voie vers une reconnaissance renouvelée.