À un mois de l’élection présidentielle prévue le 12 octobre 2025, les acteurs et entrepreneurs culturels camerounais ont lancé un appel solennel aux candidats en dévoilant un Pacte culturel inédit. L’événement, organisé par le Groupement des Acteurs des Industries Culturelles et Créatives du Cameroun (Acticcc), s’est tenu au Centre culturel UBUNTU, en présence de professionnels des médias et de représentants politiques.
Une initiative sans précédent
Le Pacte culturel du Cameroun, présenté comme un plaidoyer non partisan, vise à repositionner la culture comme un levier stratégique de développement. Il propose une gouvernance culturelle ambitieuse, articulée autour de dix axes prioritaires, allant de la reconnaissance constitutionnelle de la culture à son intégration dans l’éducation, en passant par la diplomatie d’influence.
Selon Blaise Etoa, président de l’Acticcc, « cette conférence de presse est neutre, même si elle touche au politique. Les acteurs culturels travaillent à structurer la chaîne de valeur, et il est temps que les politiques intègrent la culture dans le débat électoral. »
Une réponse à l’oubli politique
L’origine de cette démarche réside dans le constat d’une faible prise en compte du secteur culturel dans les programmes des précédents candidats. Alain Boyomo, ancien journaliste culturel et directeur de publication du quotidien Mutations, a livré une analyse sans détour : « Le volet culturel est souvent traité de manière implicite, voire ignoré. Pourtant, il est fondamental. »
Le Pacte met en avant des enjeux cruciaux : création d’emplois, génération de revenus, valorisation du patrimoine, et rayonnement international. Il s’inscrit dans la dynamique de la SND30, qui a reclassé l’art et la culture comme secteur de production de biens et services.
Présence politique et engagement
Sur les douze candidats en lice, deux étaient présents : le bâtonnier Maître Akere Muna et Serge Espoir Matomba. Plusieurs représentants d’autres candidats ont également assisté à la rencontre. Avant de quitter la séance, Maître Muna a salué l’initiative :
« C’est une démarche extraordinaire. Notre pays croule sous le poids de la production. Que chacun gère son secteur. Je suis prêt à vous accompagner dans ce Pacte culturel. »
Un secteur à fort potentiel
D’après l’UNESCO (2021), la culture représente plus de 3 % du PIB mondial et emploie près de 30 millions de personnes. Au Cameroun, les Industries Culturelles et Créatives (ICC) restent sous-exploitées malgré une jeunesse talentueuse et un patrimoine riche. Le Pacte vise à transformer ce potentiel en puissance économique, sociale et diplomatique.
Les 10 axes du Pacte culturel
Reconnaissance constitutionnelle : inscrire la culture comme droit fondamental et créer un Conseil national de la culture.
Économie créative compétitive : intégrer les ICC dans les politiques de croissance et créer un fonds d’investissement.
Décentralisation culturelle : déployer des Cités de la Culture et des budgets locaux.
Financement et mécénat : encourager le mécénat, les PPP et les projets bancables.
Révolution numérique : former aux technologies (IA, VR, NFT) et créer des plateformes souveraines.
Statut des professionnels : garantir sécurité sociale et rémunération équitable.
Culture et éducation : généraliser l’éducation artistique et créer des centres de formation.
Patrimoine culturel : protéger, valoriser et numériser le patrimoine matériel et immatériel.
Citoyenneté et cohésion : utiliser la culture comme vecteur de paix et de dialogue.
Diplomatie culturelle : positionner le Cameroun comme puissance culturelle africaine.
Un plaidoyer pour l’avenir
Après deux heures d’échanges, les initiateurs ont conclu :
« Ce projet est une proposition, un plaidoyer. Il est temps de cesser de voir la culture comme un simple divertissement. Elle est un secteur de création d’emplois, de revenus, un levier de développement économique. Nous irons à la rencontre des candidats pour porter ce message. »
